Mars 1997
Màj Avril 2005
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Un goût de cendres

Nouvelle noire avec deux illustrations

Ce matin je me suis réveillé avec un goût de cendres dans la bouche. J’avais froid, j’avais faim, mes yeux étaient bouffis d’un sommeil agité.

Je suis déjà arrivé à remplir mon ventre, ce n’était pas si difficile.

Pour le froid faudra attendre le soleil, la lumière, si elle vient... Pour l’instant, c’est plutôt le brouillard et la chape de plomb. L’eau ruisselle et s’infiltre partout, imbibe le sol. Le froid pénètre jusqu’aux os et fige toute chose.

Ensuite, la routine des matins glauques. J’avais soif. J’ai bu sans arrêt mais ça n’a rien changé, toujours cette bouche pâteuse collée par les cendres de la veille.

Pas un souffle, les fumées retombent et les poussières se déposent un peu partout sur le béton gris. Une crasse uniforme qui s’incrustent et noircit même les arbres.
Ca-y-est, les gens, la mort dans l’âme, s’en vont travailler comme chaque jour. Leurs vestes grises, ou noires, se perdent dans les flots. On dirait des tas de cendres, des morts en attente d’enterrement qui errent sans savoir où ils vont. Les fumées les recouvrent et la bruine les met à nu, c’est-à-dire qu’ils sont transparents.

Je poursuis mes occupations, en essayant de m’extraire de ma gangue, de couper le cordon qui me relie à l’abîme. Le soleil a percé quelques minutes, le temps de voir la vie en vert et de sécher mes larmes.

Le soir le calme vient, la nuit s’étire, je la fais durer le plus longtemps possible pour ne pas mourir tout de suite.
Ensuite, il faut bien se coucher, fermer les yeux, accepter le noir, sans espoir.

Partir avec l’espérance du matin. Naître à l’aube pour vivre plus de soleil et de chaleur. Peut-être folâtrer dans l’herbe aux chants de la forêt naissante, mouillés par la rosée de l’amour du jour. Sentir le vent, la rose et le feu. Un feu qui brûle sans cesse, sans faire de cendres. Le vent nourrit le brasier et purifie l’air, emporte les scories poussiéreuses pour faire place aux parfums subtils de vie.

Au lieu de mourir chaque jour un peu plus, seuls, naufragés volontaires de la vie, pourrons-nous renaître de nos cendres pour revivre sans fin. Renaître chaque jour parmi les siens pour réduire les vides.

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Artiste.Auteur.Réalisateur
Courts métrages d'animation, dessin noir & blanc, dessin sur sable, peinture, BD, écrits...
David Myriam, Artiste, art-engage.net