Ce recueil de nouvelles est un ensemble de 27 textes courts basés sur des souvenirs d’enfance à la ferme.
2. Le Chocolat
A la ferme, j’ai découvert avec délice les diverses utilisations possibles du chocolat, noir bien entendu.
Le matin ou au goûter, on prend de grands bols de lait brûlant et au lieu d’y verser du vulgaire Banania plein de relents colonialistes, on coupe de petits morceaux de chocolat qui fondent au fond du bol, on y puise alors de délicieuses cuillerées crémeuses. Le tout est parfois accompagné de tartines beurrées recouvertes de cacao en poudre.
Le lait vient directement du pis des vaches que ma grand-mère trait deux fois par jour à l’aide d’une machine électrique étrange.
On apprécie aussi les sortes de brioches fourrées, quand elles sont chaudes, le chocolat fond à l’intérieur. Mais le meilleur est peut-être encore les barres de chocolat qu’on mange à quatre heures avec du pain de campagne. Parfois, on va se servir dans le placard pour en avoir davantage, on a repéré la boîte et l’endroit, ma grand-mère ne la cache pas vraiment. Avec ce goûter dans le ventre, j’étais prêt à aller faire les quatre cents coups dehors, glisser sur la glace ou courir après les poules stupides.
A l’époque, le lait était un don du ciel, je ne savais pas, ou ne voulais pas savoir, que les veaux étaient tués en bas âge pour que ma grand-mère puisse vendre le lait des vaches, ces vaches dont certaines avaient un nom et qui sont sans doute parties pour l’abattoir quand la grand-mère a pris sa retraite.